Citation du jour: « L’ homme et la nature ne font qu’un. La proteger c’est preserver l’avenir de l’homme « .

COP : l’Afrique, du silence diplomatique à la voix du Sud global

Trente ans après la première Conférence des Parties (COP) sur le climat, l’Afrique n’est plus en marge du débat. De spectatrice à stratège, le continent s’est imposé comme une force collective dans la diplomatie climatique mondiale. Son message est clair : peu responsable du dérèglement climatique, il refuse d’en payer seul le prix.

Des débuts en sourdine : Quand les premières COP s’ouvrent au milieu des années 1990, la voix africaine est à peine audible. Chaque pays défend sa propre ligne, souvent dans l’urgence et sans coordination. Pourtant, le paradoxe saute aux yeux : l’Afrique subit de plein fouet les effets du réchauffement — sécheresse, inondations, insécurité alimentaire — tout en n’émettant qu’environ 4 % des gaz à effet de serre mondiaux.

Face à cette injustice, un mouvement s’organise. Dès 2010, la création du Groupe des Négociateurs Africains (AGN) change la donne. Soutenu par l’Union africaine (UA), il fédère les délégations autour d’un objectif commun : parler d’une seule voix pour défendre la justice climatique.

Paris 2015, le réveil diplomatique : Le véritable tournant survient à la COP21 à Paris. L’Afrique y obtient la reconnaissance officielle de sa vulnérabilité particulière. Mieux, elle arrache la création de l’Initiative africaine pour les énergies renouvelables (IAER), un mécanisme soutenu par plus de 10 milliards de dollars d’engagements. Le continent montre alors qu’il ne veut plus être spectateur, mais acteur d’une transition énergétique juste.

L’Union africaine, chef d’orchestre du climat : Depuis, la Commission de l’Union africaine a pris la main. Avant chaque COP, elle réunit ministres, experts et négociateurs pour harmoniser les positions. Les priorités sont ensuite validées par la Conférence des chefs d’État, qui envoie un signal politique fort : l’Afrique se présente unie, organisée et stratégique.

Cette coordination s’appuie aussi sur les Communautés économiques régionales (CEDEAO, SADC, CEEAC), qui remontent les priorités locales pour bâtir un consensus continental. Résultat : une cohérence diplomatique rare, saluée même par les partenaires européens.

Sharm El-Sheikh, Nairobi, Addis-Abeba , une montée en puissance : Ces dernières années, le continent a enchaîné les avancées. À la COP27 en Égypte, l’Afrique pousse la création du Fonds pour les pertes et dommages. En parallèle, l’Africa Carbon Markets Initiative (ACMI) voit le jour, pour valoriser les crédits carbone africains et attirer des financements privés.

Le Sommet africain sur le climat de Nairobi (2023), suivi de celui d’Addis-Abeba (2025), a consacré cette dynamique. Les chefs d’État y ont exigé une refonte du financement climatique mondial et une meilleure prise en compte des dettes liées au climat. Des positions désormais incontournables dans les discussions internationales.

Entre influence et frustration : Malgré ces succès, le combat est loin d’être gagné. L’Afrique réclame toujours que ses “circonstances particulières” soient pleinement reconnues dans les accords mondiaux. Les promesses de financement tardent à se concrétiser, et le continent peine à faire valoir ses priorités face aux grandes puissances industrielles.

Mais sur le terrain diplomatique, la donne a changé. L’Afrique ne parle plus de vulnérabilité comme d’un fardeau, mais comme d’un levier politique. Ses négociateurs pèsent dans les décisions du G77+Chine, inspirent de nouvelles coalitions et placent la justice climatique au cœur des débats.

Une diplomatie climatique qui s’affirme : Des bancs d’observateurs à la table des décideurs, l’Afrique a gravi les échelons avec méthode. Sa stratégie ? Miser sur la solidarité continentale et sur la légitimité morale de sa cause.

Aujourd’hui, le continent ne demande plus seulement à être aidé : il revendique un droit à la transition, financé, équitable et souverain.

Et dans un monde qui vacille sous la pression climatique, cette voix africaine, longtemps ignorée, résonne désormais comme une conscience collective.

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